vendredi 11 mars 2011

Intermède : arrivée et adaptation à Ouagadougou

Je suis arrivée à Ouagadougou, il y a maintenant un peu plus d’une semaine et quand je vois le retard que j’ai pris avec le blog, j’écris dès aujourd’hui pour ne pas oublier les sensations et les impressions tant qu’elle sont chaudes, puis pour vous mettre un peu plus au "goût du jour".

Ouagadougou est une grande ville mais n’a pas l’importance, ni la densité de Dakar. Si on peut faire un comparatif, je dirais que Dakar correspond à Montréal, tandis que Ouagadougou s’apparente à Sherbrooke. La ville est nettement plus étendue et vaste, il y a  peu d’immeubles et aucune tour à bureau. Les rues sont larges, les bâtiments espacés, les taxis verts sont en bien meilleur état que les jaunes de Dakar. Cette ville, contrairement à Dakar, est dominée par le rouge:  briques, banco, sable. Plusieurs axes principaux de circulation se divisent en deux voies: une large pour les voitures et une autre plus étroite pour les deux roues. Je n’ai jamais vu autant de deux roues dans une ville ... Peut être à Rome... Je dois trouver le moyen de prendre un photo de la circulation à 18h00 à un feu rouge, les voitures sont cernées de deux roues : vélos, motos, mobylettes. Nous ressemblons à des nuées, des escadrons de moustiques, eh oui j’en fais partie car Lina a une ch’tite moto et que je me promène derrière elle dès qu’elle n’est plus au boulot. Et j’en  profite pour redécouvrir les plaisirs de la moto: le cheveu au vent, l’œil larmoyant, le sable dans les dents (ça change des moucherons et autres moustiques ;o) et le nez frétillant. Ouaga sera donc pour moi une ville de sensations. Selon les quartiers traversés et l’heure, on y sent la fraicheur des jardins, le sucre des fleurs que je pense être du jasmin, l’âcreté de la fumée des décharges, les pots d’échappements et l’huile de moteur, la sécheresse de l’air du milieu de la journée, la verdure des potagers le long du barrage, l’eau croupie de la canalisation principale.
Les habitants sont bien moins insistants que dans le centre ville de Dakar, ils sont même plus distants, plus respectueux de l’espace vital. Excepté dans les zones artisanales, marchandes ou touristiques, peu de personnes vous approchent et vous parlent, ils sont un peu moins bavards que les Sénégalais, moins accrocheurs, plus doux, discrets, timides, j’ai du mal à trouver le mot approprié.  Dans le quartier, les enfants s’approchent de moi pour me serrer la main, les voisins de Lina me saluent d’un bonjour avant midi et d’un bonsoir dès 13h00. Mais les interactions en restent là. Excepté les épiciers du coin qui se moquent de moi : « Il fait chaud ! » J’ acquiesce en essuyant, mon front, mon cou... Je pourrais essorer mon t-shirt! La décence me l’interdit, j’ai une allure de serpillière souriante! En fait, tant que je suis en mouvement, la sueur s’évapore, rafraichit le corps mais dès que je m’arrête, que je m’abrite ou que je bois de l’eau fraiche, je me transforme en flaque, bref je dégouline!

Contrairement à Dakar, je m’initie doucement à Ouagadougou. J’ai beaucoup de mal à quitter le Sénégal. En 5 semaines, j’y ai pris mes habitudes, mes repères, mes contacts. Ici, je dois tout recommencer. Même si Lina est là, elle travaille la journée et je me débrouille comme une grande fille, bien entendu, elle m’a donné plein de tuyaux pour la ville, me déplacer, les prix en cours etc... Mais le Sénégal me manque terriblement : la fraicheur de la côte, mais surtout Léo, Phil, Oumar, Deffa, Fama, Soraya et son Lébou, la famille d’Astrid, Guillaume, les connaissances de droite et de gauche qui sont autant de petits cailloux semés qui jalonnent  mon parcours.

Je dois réapprendre la ville, le mode de communication, refaire mon trou... Une certaine lassitude me prend que la chaleur amplifie lors des premiers jours. Résultats : repos, piscine, découverte timide de la ville, planification et prévision budgétaire de ce que je veux faire ici dans une douce nostalgie sénégalaise. C’est au bout de quatre jours que j’investie la ville. La chaleur qui m’accablait la veille s’oublie vite, occupée à découvrir. Bien entendu, je me cache à l’ombre entre 12h00 et 14h00. La ville est tellement étendue qu’elle ne se parcourt pas aisément à pied, il faut pour se rendre d’un point à un autre utiliser soit le taxi, soit la moto. Donc je rencontre des guides improvisés : un guide du musée national qui veux que je relise son projet de festival contre la découverte du village artisanal et de la maison des femmes, un vendeur de souvenirs qui me promène pour 500 CFA autour du barrage, découverte de la cathédrale, centre national d’art... Là encore les hommes restent en avant et s’égayent dès qu’une toubab seule est en vue, les femmes, excepté quelques marchandes de fruits, restent discrètes mais nettement moins méfiantes que les sénégalaises... Le manque de tourisme sans doute.

Le babillage des sénégalais me manque, il est ma « référence africaine » , ce avec quoi j’ai du batailler lors de mes 1res journées sur le continent, je sais me débrouiller avec, y répondre et finalement j’apprécie ce jeu, cette compagnie éphémère où personne n’est dupe. Le silence et la discrétion burkinabé me gêne, me trouble, me fait ressentir la solitude de façon plus aigue, plus pesante. J’observe Lina et sa façon de gérer ses relations qui est tout autre que la mienne. Elle vit ici depuis deux ans, le travail, le quotidien, l’efficacité a pris le dessus sur la curiosité ébahie et nonchalante de la touriste que je suis. Directe, sans état d’âme, elle connait les ficelles, elle contrôle et dirige les choses. Elle m’ouvre un autre point de vue, une autre façon d’être en relation avec eux, plus réaliste, distante elle aussi, elle n'est plus naïve, si toutefois elle l'a été un jour. Lina m’accueille dans son immense maison, paisible, ventilée. Elle m’aide à prendre mes repères, me présente à ses amis et collègues, me promène, respecte mon rythme même si elle doit le trouver très lent...

 Le 8 mars c’était la journée internationale de la femme: ce jour est férié au Burkina pour les entreprises et le centre ville mais pas vraiment pour les petites boutiques de quartier. Nous avons été réveillées ce matin dès 8h00 par la musique à tue tête, lancée d’un ampli au coin de la rue, des rires et des éclats de voix... Le temps d’émerger et la musique s’est tue. Ce soir, elle a repris quelques instants avant la coupure d’éléctricité. Les femmes du quartier, habillées du pagne imprimé pour cette journée, se réunissaient autour de l’ampli. Elles apportaient des chaises et de quoi manger : elles dansaient. Ce joli bal improvisé a coupé court... Quelques chants et claquements de mains ont tenté de suppléer au manque de musique, mais lorsque nous sommes sorties de la maison, les femmes s’étaient dispersées.

2 commentaires:

  1. Merci de nous faire partager ton récit de voyage... Que de découvertes, de rencontres et d'émotions !
    Continue de profiter pleinement de cette expérience si enrichissante... et de nous la faire partager ! grâce à toi, je voyage, je rêve, je m'évade...
    Take care,
    Je pense très fort à toi,
    Mille bizzzzzzz,
    Estelle

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  2. Profite de toutes ces belles sensations ! Ici le printemps arrive timidement alors tes récits me font voyager... tes photos aussi ! Elles sont extraordinaires ! Bizzz du continent froid, ca peut t apporter un peu de fraicheur !

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